Le château de Versailles conserve l'une des plus belles collections d'œuvres napoléoniennes en France. Celle-ci permet notamment d’évoquer le grand projet dynastique de Napoléon. Une présentation temporaire évoque ce projet porté par les femmes : épouses, sœurs et belles-sœurs de l'Empereur.

L’impératrice Marie-Louise (1791-1847) et le roi de Rome (1811-1832) endormi, par Joseph Franque, 1812. © Château de Versailles, Dist. RMN / - Christophe Fouin.
La deuxième épouse de Napoléon dévoile le futur roi de Rome, tant attendu. En tenue impériale, elle tient un médaillon de Bonaparte contre son coeur, exprimant ainsi sa soumission au projet dynastique dont la taille disproportionnée de l’enfant est également une manifestation.
Dès l’avènement du Consulat, fin 1799, et plus encore après la proclamation du « Consulat à vie », en 1802, se posa avec acuité la question de la succession de Napoléon Bonaparte. Devenu empereur, celui-ci mit en place une stratégie familiale européenne, plaçant les siens sur les trônes des souverains qu’il avait renversés, nouant ou défaisant des alliances matrimoniales au gré de ses ambitions.

L’empereur Napoléon 1er et ses neveux et nièces sur la terrasse du château de Saint-Cloud, par Louis Ducis, 1810. © Château de Versailles, Dist. RMN / - Franck Raux.
Ce portrait de l’empereur, qui pose tel un père de famille nombreuse, illustre la question de la succession impériale à la veille de son remariage. Après avoir adopté les enfants du premier mariage de Joséphine, Eugène et Hortense de Beauharnais, il envisagea la succession par le biais de ses neveux, fils d’Hortense et de son frère Louis, qui figurent ici avec ceux de Joachim et Caroline Murat : de gauche à droite, Letizia Murat, Napoléon- Louis et Louis-Napoléon Bonaparte, le futur Napoléon III, sur les genoux de l’Empereur, puis Louise, Achille et Lucien Murat.
Après son remariage avec la jeune archiduchesse d’Autriche, Marie-Louise de Habsbourg-Lorraine, en 1810, il se présenta comme le fondateur d’une nouvelle et quatrième dynastie, s’inscrivant dans la longue lignée des Mérovingiens, Carolingiens, puis Capétiens, dont les Bourbons étaient les derniers représentants.
La jeune impératrice étant la nièce de la reine Marie-Antoinette, Napoléon devenait ainsi le propre neveu du roi Louis XVI, par l’un de ces retournements de situation – un tour de passe-passe – dont il avait le secret. Lui qui avait combattu sans relâche toute tentative de restauration monarchique kidnappait à son profit, et à celui de ses proches, l’héritage millénaire de la monarchie française. Mais la 4e dynastie ne survécut pas à sa chute en 1814-1815.
Frédéric Lacaille,
conservateur en chef du musée national des châteaux de Versailles et de Trianon
- Pauline Borghèse (1780-1825), née Bonaparte, duchesse de Guastalla, par Robert Lefèvre, 1806.Soeur préférée de Napoléon, elle lui fut fidèle tout au long de sa vie, comme l’exprime son attitude devant le buste de l’Empereur. Elle participa activement au projet dynastique en épousant le général Leclerc, puis le prince romain Camille Borghèse, mais son unique fils, Dermide, mourut à l’âge de 6 ans. © Château de Versailles, Dist. RMN / Christophe Fouin.
- Julie Bonaparte (1771-1845), née Clary, reine de Naples, et sa fille Zénaïde (1801-1854), par Robert Lefèvre, 1807.Issue d’une famille de commerçants marseillais aisés, Julie Clary épousa Joseph Bonaparte, frère aîné de Napoléon, en 1794. Elle devait devenir reine de Naples (1806-1808), puis d’Espagne (1808-1813), mais ne donna à la dynastie que deux filles, Zénaïde, que l’on voit ici, et Charlotte, qui toutes deux épousèrent des cousins Bonaparte. Fuyant la cour et les mondanités, elle tarda toujours à rejoindre, dans ses royaumes, son mari, auprès duquel elle fut une souveraine discrète. Mais elle sut pardonner ses nombreuses infidélités à cet époux « bien aimé », qui mourut finalement dans ses bras. © Château de Versailles, Dist. RMN / – Franck Raux.
- Caroline Murat (1782-1839), née Bonaparte, grande duchesse de Berg et de Clèves, et sa fille Letizia (1802-1859), par Louise-Élisabeth Vigée-Le Brun, 1806-1807.De toutes les soeurs de l’Empereur, la plus jeune, Caroline, fut la plus ambitieuse et la plus politique. Mariée à Joachim Murat, aide de camp de son frère, dont elle tomba amoureuse très jeune, elle souhaita ardemment un trône qui tarda à venir. Princesse impériale, épouse du grand-duc de Berg et de Clèves, c’est alors qu’elle posa avec sa fille aînée pour Mme Vigée-Le Brun, la célèbre portraitiste de Marie-Antoinette, rentrée d’une longue émigration. Aboutissement de ses ambitions, Caroline Murat devint enfin reine de Naples en 1808. © Château de Versailles, Dist. RMN / – Franck Raux.
- Marie-Louise, impératrice des Français (1791-1847), et le roi de Rome (1811-1832), par François Gérard, 1812. Le remariage de Napoléon avec Marie-Louise, en 1810, devait être une garantie pour l’avenir de la dynastie. N’ayant pas eu d’enfants de Joséphine, Napoléon s’était résolu à divorcer et jeta son dévolu sur la fille de l’empereur d’Autriche, qui l’année suivante lui donnait un fils, immédiatement titré « Roi de Rome ». Radieuse est la jeune mère, qui posa en 1812 pour François Gérard, dans ce portrait qu’elle offrit ensuite à son époux. Celui-ci le fit placer dans l’un des salons de son appartement au palais des Tuileries. L’enfant, portant déjà les insignes de la Légion d’honneur, tient dans la main une grenade ouverte, symbole de l’unité de l’État. © Château de Versailles, Dist. RMN / – Franck Raux.
Avec ces portraits des différents membres de la famille de Napoléon, cette présentation temporaire dans l'Appartement de Madame de Maintenon illustre également l'évolution, en ce début du XIXe siècle, du portrait d'apparat dont les codes ont été bouleversés par la Révolution.
À VOIR :
Un air impérial
Présentation au château de Versailles dans l'appartement de Madame de Maintenon
Du 10 juillet au 30 novembre 2020
Horaires : Tous les jours, sauf le lundi, 9 h-18 h 30
(dernière admission à 17 h 30).