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Cette œuvre préparatoire représentant le martyre de sainte Victoire préfigure un relief d’autel de la Chapelle royale.

Le Martyre de sainte Victoire, par Nicolas-Sébastien Adam (1705-1778), relief, plâtre patiné, 1737. © Château de Versailles, Dist. RMN / © Christophe Fouin

Passée en vente publique en juin 2017, une admirable sculpture de Nicolas- Sébastien Adam (1705-1778) a pu être acquise pour le château de Versailles. Ce relief en plâtre, revêtu d’une patine imitant le bronze, représente le martyre de sainte Victoire, chrétienne romaine du IIIe siècle immolée par le fer pour avoir refusé de participer à un sacrifice païen en l’honneur de Jupiter.

L’oeuvre définitive en bronze ornant l’autel de sainte Victoire dans le bas-côté nord de la Chapelle royale. © EPV / Didier Saulnier

Si cette sculpture intéresse tant Versailles, c’est parce qu’elle est en rapport avec le relief de bronze qui orne, depuis 1747, l’autel de sainte Victoire, dans le bas-côté nord de la Chapelle royale. En 1710, en effet, à l’achèvement de la Chapelle, les reliefs des autels secondaires n’existaient pas encore. Ce n’est qu’en 1734 qu’ils furent commandés pour illustrer des épisodes de la vie des saints auxquels ces autels sont dédiés, tous patrons de membres de la famille royale. Par les variantes qu’il présente en regard de l’œuvre définitive en bronze, le plâtre constitue un modèle préparatoire, probablement un modèle de présentation destiné à être validé par le commanditaire. Il s’agit d’un type d’œuvres très rares qui reflète une étape importante dans le processus d’élaboration de l’artiste1 : à ce titre, il constitue un témoignage de première main pour mieux connaître la fabrique de Versailles. Du reste, pour les autres autels, aucun relief préparatoire n’est connu à ce jour.

Par son intérêt documentaire, cette œuvre trouve pleinement sa place à Versailles. Le Château s’est récemment doté d’une galerie de l’Histoire – préfiguration partielle d’un futur musée de l’Œuvre – qui comporte déjà plusieurs pièces de cette nature. On y trouve, notamment, la statuette en terre cuite de saint Athanase, par Poultier, préparatoire à la grande statue en pierre de la balustrade extérieure de la Chapelle. C’est dans cette galerie que le relief sera tout naturellement présenté.

Alexandre Maral,
Conservateur général au musée national des châteaux de Versailles et de Trianon

1 Cas unique pour une sculpture de Versailles, il existe même un troisième relief, en terre cuite, conservé dans l’église Saint-Louis de Fontainebleau. Ce dernier, comportant encore plus de variantes, pourrait correspondre à la première pensée du sculpteur : le bozzetto.

Le grand V au centre de la composition. © Château de Versailles, Dist. RMN / © Christophe Fouin


Une tension dramatique portée par la composition

Les mollets de Jupiter, en haut à gauche de la composition. © Château de Versailles, Dist. RMN / © Christophe Fouin

Foisonnante, avec des effets de drapés qui soulignent la violence de la situation, la composition est marquée de ce style romain dont Adam a eu le loisir de s’imprégner lors de son long séjour dans la Ville éternelle, entre 1726 et 1734. Elle s’ordonne principalement en un grand V formé par les personnages du bourreau, de la martyre et du prêtre païen Julien. Ce dernier adjure une dernière fois Victoire de se soumettre à Jupiter – dont seuls les pieds sont visibles dans la partie haute de la composition –, mais la sainte est déjà percée par un glaive, tandis que le bourreau l’attache au taureau qui doit traîner son cadavre.

© Château de Versailles, Dist. RMN / © Christophe Fouin

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