Malgré les efforts entrepris par son royal époux pour faire de la laiterie
de Rambouillet un « chef-d’œuvre pastoral d’art total », Marie-Antoinette ne s’y rendit qu’une seule et unique fois, le 26 juin 1787. Elle préférait
son domaine champêtre de Trianon ! Parmi les édifices d’apparence rustique, couverts de chaume, qui furent élevés par Richard Mique à partir de 1783 pour la reine, deux servaient de laiterie, l’une « de préparation », détruite en 1810, et l’autre « d’agrément », récemment restaurée.

Laiterie d’agrément de Marie-Antoinette, au hameau de la Reine, adossée à la tour de Marlborough. © EPV / Thomas Garnier
La première, dont les murs intérieurs étaient peints en blanc, de même que les volets des fenêtres, renfermait une table centrale, des tables d’appui et une auge en pierre, alimentée par un robinet. Établie à proximité, la seconde laiterie, rectangulaire, avait initialement ses murs intérieurs également peints en blanc : trouvant ce décor trop sobre, Marie-Antoinette décida, peu de temps après son achèvement, de faire reprendre les parois à l’imitation de marbre blanc veiné. Quant à la voussure, qui encadre un faux ciel bleu, elle fut alors ornée de caissons en trompe-l’œil. Ouverte sur le jardin par quatre portes-fenêtres, dont l’une conduit à la tour de Marlborough, elle contenait une table centrale rectangulaire et des tables d’appui soutenues par des consoles richement sculptées, le tout aussi en marbre blanc veiné, qui furent vendues à la Révolution, puis remplacées à la demande de Napoléon Ier. L’Empereur substitua le dallage en pierre de liais par du marbre bleu turquin et blanc veiné, et fit placer dans les niches, qui abritaient probablement à l’origine des grands vases en porcelaine, quatre groupes de dauphins entrelacés.

Intérieur de la laiterie de la Reine au Hameau, avec son plafond à caissons en trompe-l’œil. © EPV / Thomas Garnier
Dans cette laiterie dépourvue de fontaine, « la crème, contenue dans des vases de porcelaine superposés sur des tables de marbre blanc, était rafraîchie par le ruisseau qui traversait la pièce1 ». Un service constitué de soixante-dix-huit pièces en porcelaine y avait été livré en 1786 par la manufacture dite « de la Reine », établie rue Thiroux à Paris. Marie-Antoinette ne put profiter de cette laiterie que quelques années seulement, la famille royale ayant été contrainte de quitter (définitivement) Versailles, le 6 octobre 1789.
Antoine Maës,
docteur en histoire de l’art
1 Félix de France d’Hézecques, Souvenirs d’un page de la cour de Louis XVI, Paris, Didier et Cie, 1873, p. 245.
Cet article est extrait des Carnets de Versailles n°25 (octobre 2024 – mars 2025).

Terrine à lait, par la Manufacture de la rue Thiroux (Paris), 1786, musée national des châteaux de Versailles et de Trianon. © Château de Versailles, Dist. RMN © Christophe Fouin
À VOIR
La laiterie du hameau de la Reine, à Trianon, dans le cadre de la visite guidée
« Le Hameau, de Marie-Antoinette à Marie-Louise » (sur réservation)
La laiterie du domaine de Rambouillet, avec l’espace de médiation ouvert à côté, depuis l’automne 2023, dans le pavillon du Roi, évoquant l’atmosphère qui régnait au sein de la laiterie de la Reine à la veille de la Révolution. Renseignements pratiques.

Laiterie de Rambouillet avec le mobilier « à l’Étrusque » tout juste installé. © CMN / Benjamin Gavaudo
À LIRE
Antoine Maës, La Laiterie de Marie-Antoinette à Rambouillet. Un temple pastoral pour le plaisir de la reine, Montreuil, Gourcuff Gradenigo, 2016.
Renaud Serrette et Gabriel Wick (dir.), Vivre à l’antique de Marie-Antoinette à Napoléon Ier, Paris / Saint-Rémy-en-L’Eau, Centre des Monuments nationaux / Éditions Monelle Hayot, 2021.