magazine du château de versailles

De retour dans
la chambre du Roi

Il s’agit des seuls objets, avec les tableaux de Valentin de Boulogne,
qui s’y trouvaient réellement en 1789. Ces deux vases chers à Louis XVI, ainsi qu’une autre paire acquise en 1998, sont revenus à leur emplacement d’origine, sur les cheminées placées de part et d’autre.

Paire de vases « à têtes de lion » installés dans la chambre du Roi, en plein cœur du château. Peintures par Antoine-Joseph Chappuis et Geneviève Taillandier et dorure par Henri-Martin Prévost. Manufacture royale de Sèvres, 1780, porcelaine dure. Musée national des châteaux de Versailles et de Trianon. Inv. V.2020.17.1 et 2. © Château de Versailles, Dist. RMN / © Christophe Fouin

Le château de Versailles a pu acheter en 2020, grâce au legs Heymann, deux exceptionnels vases « à têtes de lion » en porcelaine de Sèvres qui appartenaient à Louis XVI. Ces vases à décor d’oiseaux et de paysages chinois allaient ainsi retrouver les vases « jardin » revenus à Versailles1 en 1998 et auxquels ils étaient associés à l’origine. Ces quatre pièces avaient coûté 4800 livres lors des ventes2 qui se déroulèrent au château en décembre 1780. Le 25 avril dernier, nous avons eu le bonheur de les replacer sur les deux cheminées de la chambre du Roi, comme celui-ci l’avait souhaité à l’époque3.

Un long voyage pour ces deux paires de vases
À la Révolution, les quatre vases avaient quitté Versailles séparément. Ceux « à têtes de lion » furent sans doute transférés aux Tuileries peu après le départ de la famille royale, le 6 octobre 1789. Les vases « jardin » gagnèrent également les Tuileries, mais plus tard, le 27 décembre 1791, où ils retrouvèrent les vases « à têtes de lion » dans la chambre du Roi de ce palais. Après le 10 août 1792, les quatre vases furent placés au Louvre, sous la garde du géographe Mentelle. Ils furent ensuite apportés à l’hôtel des Menus-Plaisirs en août 1793. Enfin, le 12 février 1794, ils rejoignirent le Garde-Meuble national. On les mentionne, en effet, au début de l’année 1795, à l’hôtel de l’Infantado (actuel hôtel Saint-Florentin), où ils furent vendus, en prairial an III (mai-juin 1795), en deux lots différents. À nouveau séparés, on perd leur trace tout au long du XIXe siècle. C’est seulement au début du XXe siècle que les vases « à têtes de lion » réapparurent dans une collection britannique.

Sur la cheminée de Madame Victoire
Le retour de ces garnitures à leur emplacement d’origine rappelle heureusement celui de 2013, quand fut réuni l’ensemble de cinq vases à fond vert ayant appartenu à Madame Victoire, l’une des filles de Louis XV. En effet, à la suite de la rétrospective consacrée à l’un des meilleurs peintres de figures de la Manufacture de Sèvres, Charles Nicolas Dodin
(1734-1803), le Metropolitan Museum acceptait de déposer à Versailles deux de ces vases, ornés de scènes peintes par l’artiste, tandis que le château acquérait, sur le marché de l’art new-yorkais, les trois autres pièces de l’ensemble. Pour la première fois – et grâce à un geste extrêmement généreux – une telle garniture retrouvait sa place, sur la cheminée de la chambre de la princesse, deux cent cinquante ans plus tard.

Marie-Laure de Rochebrune,
conservateur général au musée national des châteaux de Versailles et de Trianon

1 C. Baulez, « Acquisitions », La Revue du Louvre, nº 27, 1998, p. 92 et Versalia, n° 3, 2000, p. 26-27.
2 A.M.N.S., Vy 8, fol. 44 vº.
3 M.-L. de Rochebrune in Versalia, nº 25, 2022, p. 42-43.

Cet article est extrait des Carnets de Versailles n°21 (octobre 2022 – mars 2023).

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