Il n’en reste aujourd’hui que quelques vestiges. Comment imaginer le faste du château de Meudon, demeure personnelle du Grand Dauphin
qui consacra des sommes colossales à son embellissement ?
L’exposition permet d’appréhender toutes les richesses de ces lieux somptueux, déployés en quelques années selon une configuration
très particulière, liée à la forte dénivellation du site.

Veue du chateau de Medon, du Coté des parterres [détail], par Jacques Rigaud, 1733, musée national des châteaux de Versailles et de Trianon. © EPV / Christophe Fouin
Au château de Versailles, le Grand Dauphin bénéficie, à partir de 1684, d’un grand appartement qui lui permet d’y présenter ses collections. Mais à partir de 1693, le prince devient également propriétaire, à l’âge de trente-deux ans, du château de Choisy, agréablement situé au bord de la Seine, au sud-est de Paris. Néanmoins, celui-ci est bientôt jugé trop petit et éloigné de Versailles. C’est ainsi que deux ans plus tard, grâce à l’aide de son père, Monseigneur l’échange contre celui de Meudon, jusqu’alors propriété de la veuve du marquis de Louvois.

Des sculptures de la collection du Grand Dauphin au château de Meudon, présentées dans la troisième partie de l’exposition. Mauresse et Maure (musée national du château de Compiègne), paire de termes en marbres entourant le buste en porphyre et bronze d’Alexandre le Grand (musée du Louvre), tous datant du XVIIe siècle. En arrière plan, les statues de bronze de Adonis, dit aussi Jeune homme, Jeune berger ou Jeune athlète et de Vénus Médicis, par Jean-Balthazar Keller, 1685-1687, musée national des châteaux de Versailles et de Trianon. © EPV / Didier Saulnier
Le Château-Vieux réaménagé pour le Grand Dauphin
Situé sur un plateau surplombant la Seine et Paris, le château se trouve au cœur d’un grand domaine de chasse entre Versailles et la capitale. Il devient bientôt le lieu de représentation de l’héritier du trône qui y tient sa propre cour en y recevant de nombreux invités. Plus de deux mille chasses y seront organisées ainsi que de nombreuses fêtes.
Monseigneur consacre les seize dernières années de sa vie au déploiement du domaine. Le château préexistant se compose d’un large corps de bâtiment à deux niveaux d’élévation, doté en son centre d’un imposant pavillon octogonal et de deux ailes en retour. L’escalier central monumental permet d’accéder, au premier étage, au grand salon ovale dit « des Maures », édifié par Louis Le Vau en 1655. Il donne accès, côté est, à l’appartement du Roi, puis à ceux de madame de Maintenon et de la princesse de Conti, demi-sœur du Grand Dauphin. Côté ouest, une enfilade de pièces est dédiée aux soirées d’appartement.

Projet de plafond, par Claude III Audran, vers 1700-1710, Paris, musée des Arts décoratifs. © Paris, musée des Arts décoratifs / © Les Arts Décoratifs / Christophe Dellière.
Projet de décor évoquant ceux réalisés par Audran pour le Grand Dauphin à Meudon.
Le prince lance de grands travaux d’aménagement, confiés à Jules Hardouin-Mansart, premier architecte du roi. Dès 1699, ce dernier agrandit l’appartement du Grand Dauphin, au rez-de-chaussée de l’aile est du château. Six pièces en enfilade s’y succèdent : une salle des gardes, une salle à manger, un salon du billard, une antichambre, une chambre et un cabinet, suivis d’une garde-robe en retour. Certains plafonds sont repeints de grotesques par Claude III Audran, artiste particulièrement apprécié du prince. Un appartement contigu est attribué à Monsieur, frère du roi, puis, après sa mort, au fils et à la belle-fille du Grand Dauphin, le duc et la duchesse de Bourgogne.
Flanquant perpendiculairement l’aile ouest du château, Mansart, en 1701, dresse les plans d’une nouvelle chapelle palatine à deux étages. Petite sœur de la chapelle royale de Versailles, alors en construction, elle est achevée en 1702 et son autel orné d’une toile d’Antoine Coypel représentant la Résurrection du Christ.

Projet de plafond [détail des grotesques], par Claude III Audran, vers 1700-1710, Paris, musée des Arts décoratifs.
© Paris, musée des Arts décoratifs / © Les Arts Décoratifs / Christophe Dellière
L’aile des Marronniers, à la fraîcheur du nord
Le Château-Vieux s’avère vite insuffisant pour loger l’ensemble de la famille et les nombreux invités du Grand Dauphin. En 1702, le prince fait réaménager le quadrilatère de l’ancienne cour des Offices, située au nord-ouest du château, auquel elle est alors reliée par une galerie suspendue. Sa partie nord, donnant sur la terrasse des Marronniers, est particulièrement appréciée pour sa fraîcheur estivale et offre une vue dégagée sur Paris. Le prince s’y installe un appartement d’été, dénommé « appartement des Marronniers », qui comprend cinq pièces de réception.

Série de gouaches des bosquets de Versailles par Jean Cotelle, inspirées des tableaux qu’il réalisa pour le Grand Trianon. Ces miniatures se trouvaient dans le Cabinet de l’appartement des Berceaux, au rez-de-chaussée de l’aile est du château de Meudon. © EPV / Didier Saulnier
À l’arrière de cette enfilade, Mansart conçoit pour son prestigieux commanditaire un petit appartement frais ayant vue sur la cour des Offices et composé d’une antichambre, d’une chambre et d’un cabinet. C’est au sein de cette dernière pièce que le prince fait installer la série des gouaches de Jean Cotelle représentant les bosquets du parc de Versailles qui avaient été peintes pour Louvois. Les trois pièces de l’appartement sont, par ailleurs, boisées « à la capucine » selon le souhait du Grand Dauphin, qui apprécie cette technique nouvelle consistant à vernir les boiseries en leur laissant leurs couleurs naturelles.

En haut, Le Printemps et L’Automne, d’après Pierre Lepautre, bas-reliefs en plâtre réalisés avant 1871, Paris, musée Carnavalet. Au centre, Apollon vainqueur du serpent Python, attribué à Giovan Francesco Rustici, 1535-1545, Paris, musée du Louvre. © EPV / Thomas Garnier.
On pouvait admirer ces sculptures dans le vestibule supérieur du Château-Neuf de Meudon.
Le Château-Neuf : une distribution des pièces novatrice
Malgré l’aménagement de l’aile des Marronniers, les espaces continuent à manquer au sein du domaine pour bénéficier du nombre de logements suffisant. Un nouvel édifice est construit, à partir de 1706, à l’ouest du Château-Vieux. Il remplace l’ensemble des pavillons de la Grotte aménagés au XVIe siècle. Implanté à cheval sur la terrasse de l’ancienne grotte et au-dessus de la nouvelle orangerie, le château a comme spécificité de présenter cinq niveaux d’élévation du côté du parterre, au sud-est, mais seulement trois du côté de la forêt, au nord-ouest. Il ne compte pas moins de trente-sept appartements, desservis dans leur totalité par un corridor central à chaque étage, ce qui constitue la grande originalité de la demeure. Doté d’une double épaisseur, chaque appartement est constitué d’une chambre, d’un cabinet et d’une garde-robe, les chambres bénéficiant toutes de trois dégagements et d’une alcôve. Au premier étage, l’appartement du Grand Dauphin occupe l’ensemble du pavillon nord dont les six fenêtres donnent sur les parterres.

Château-Neuf de Meudon, façade et plan du 1er étage, par Jean Mariette, XVIIIe siècle, musée du Domaine départemental de Sceaux.
© CD92 / Château de Sceaux, musée départemental
C’est chez lui, à Meudon, qu’à l’âge de quarante-neuf ans, Monseigneur s’éteint, succombant à la petite vérole. Quant aux deux châteaux, c’est l’incendie qui aura raison d’eux. Tout d’abord, le Château-Vieux, en 1796, qui sera démoli en 1803. Puis le Château-Neuf, le 31 janvier 1871, dont il ne subsistera que les murs. Affecté à l’Observatoire de Paris en 1878, celui-ci est réaménagé pour accueillir une coupole. Du bâtiment d’origine, seules sont visibles aujourd’hui les façades du pavillon central et, côté sud-est, celle du rez-de-chaussée.
Pierre-Hippolyte Pénet,
conservateur en chef au musée national des châteaux de Versailles et de Trianon
Cet article est extrait des Carnets de Versailles n°27 (octobre 2025 – mars 2026).

Les jardins de Meudon et sa grande perspective. © EPV / Didier Saulnier
À VOIR
Exposition Le Grand Dauphin (1661-1711). Fils de roi, père de roi et jamais roi
Du 14 octobre 2025 au 15 février 2026
CHÂTEAU DE VERSAILLES
Salles d’Afrique et de Crimée
Horaires : tous les jours, sauf le lundi, de 9 h à 17 h 30 (dernière admission à 16 h 45).
Billets : accessible avec le billet Passeport, ainsi que pour les bénéficiaires de la gratuité.
Réservation horaire obligatoire.
Gratuit et illimité avec la carte « 1 an à Versailles ».
COMMISSARIAT
Lionel Arsac, conservateur du patrimoine au musée national des châteaux de Versailles et de Trianon
Scénographie : Philippe Pumain
AUTOUR DE L’EXPOSITION
Visites guidées de l’exposition sur réservation par téléphone au 01 30 83 78 00 ou en ligne.
Un parcours audio à télécharger sur l’application mobile.
Un podcast sur l’enfance du Grand Dauphin et deux vidéos.
Une programmation spécifique pour les abonnés « 1 an à Versailles ».
À DÉCOUVRIR EN FAMILLE
Le jeune public sera ravi de retrouver dans cette exposition :
- Des cartels adaptés aux enfants.
- Un livret-jeux gratuit, destiné aux 7-12 ans.
- Un audioguide enfant.
- Un espace de médiation conçu pour les enfants, accessible en visites guidées ou lors d’événements familles.
À LIRE
Le catalogue de l’exposition, sous la direction de Lionel Arsac, coédition château de Versailles / éd. Faton, 472 p., 24 x 27 cm, novembre 2025, 54 €.
Disponible sur la boutique en ligne du château.