À l’occasion du tricentenaire de la naissance de Terray, l’exposition
« De Versailles à La Motte Tilly. L’Abbé Terray, ministre de Louis XV »
retrace l’ascension et la vie d’un grand homme d’État au sein de
son domaine de La Motte Tilly (Aube), près de Provins,
chef-d’œuvre architectural du XVIIIe siècle.

Château de La Motte-Tilly, chambre de la princesse de Polignac. © Centre des Musées Nationaux, Paris / David Bordes
Pièce maîtresse de l’exposition, le portrait que l’Abbé Terray (1715-1778) commande en 1773 au peintre Alexandre Roslin (1718-1793) le représente comme ministre au sommet de sa gloire. Somptueuse image officielle, dont l’estampe est largement diffusée et commentée lors du Salon de 1777, elle restitue la psychologie et le caractère de Terray que le philanthrope et économiste Jean-Baptiste de Montyon, l’un de ses contemporains, décrivait comme un personnage « dur, sinistre et même effrayant : une grande taille voûtée, une figure sombre, l’œil hagard, en dessous, les manières disgracieuses, un ton grossier, une conversation sèche, point d’épanouissement de l’âme, point de confiance ; un rire rare et caustique […] ».

Joseph-Marie Terray, contrôleur général des finances, directeur et ordonnateur des Bâtiments du roi, 1774, huile sur toile, 129 x 97 cm, coll. Musée de Versailles et de Trianon. © EPV / Christophe Fouin
Joseph-Marie Terray, onzième des treize enfants de Marie-Anne Dumas de Matel et d’Antoine Terray (1662-1727), directeur des gabelles de Lyon, fermier général et secrétaire du roi, est baptisé à Boën-en-Forez le 9 décembre 1715. Conseiller-clerc au Parlement de Paris le 17 février 1736, il bénéficie de l’important héritage financier de son oncle François Terray de Rozières (†1747) premier médecin du Régent et de la duchesse d’Orléans, dite la Palatine (1652-1722), belle-sœur de Louis XIV. Il est nommé abbé de Notre-Dame de Molesme, au diocèse de Langres, en octobre 1764, puis contrôleur général des Finances de Louis XV, le 23 décembre 1769. Après le renvoi, en 1770, du duc de Choiseul, l’abbé Terray devient l’un des hommes forts du ministère dit du Triumvirat, avec René-Nicolas de Maupeou (1714-1792) et Emmanuel-Armand de Vignerot du Plessis-Richelieu, duc d’Aiguillon (1720-1788). Enfin, il occupe la prestigieuse charge de directeur des Bâtiments du roi en août 1773. Mais, un an plus tard, il démissionne avec l’avènement de Louis XVI. Incarnation de l’ascension sociale du XVIIIe siècle, talentueux réformateur, grand homme de l’histoire économique et politique du règne de Louis XV, l’abbé Terray, malgré l’appui constant de Madame de Pompadour puis de Madame du Barry, est très impopulaire. Après sa disgrâce, il se retire à La Motte, mais décède dans son hôtel parisien de la rue Notre-Dame-des-Champs, le 22 février 1778.

Façade sur le jardin du Château de La Motte-Tilly édifié par l’architecte français François Lancret (1717-1789) Alexandre Roslin. © Centre des Musées Nationaux, Paris / Philippe Berthé
Parfait exemple de l’architecture du XVIIIe siècle, le château de La Motte Tilly étend ses façades au cœur d’un vaste domaine légué à l’État par la marquise de Maillé (1896-1972), descendante de la famille Terray. Cette demeure et son parc, comprenant aujourd’hui près de 1080 hectares, témoignent d’un certain art de vivre au siècle des Lumières, avec son mobilier d’époque et son jardin à la française. C’est en 1748 que l’ensemble du domaine de La Motte est cédé aux frères Terray par Adrien-Maurice, duc de Noailles (1678-1766). Joseph-Marie Terray n’est alors que conseiller-clerc au Parlement de Paris et Pierre Terray de Rozières (1713-1780), conseiller du roi. À partir de 1754, l’édifice seigneurial alors en ruines est rasé, au profit d’une nouvelle construction édifiée par l’architecte parisien François-Nicolas Lancret (1717-1789), neveu du célèbre peintre Nicolas Lancret (1690-1743). Lorsqu’en 1758, l’abbé Terray devient l’unique propriétaire de La Motte Tilly, il transforme ses appartements privés et augmente l’espace des salons de réception pour en faire un véritable lieu de plaisance et de divertissement. Un petit théâtre est même élevé dans les communs du château. L’implication de l’abbé Terray dans ces différents chantiers s’amplifie à mesure que sa carrière politique prend de l’importance. En 1774, il agrandit encore le domaine avec l’ajout du château de Melz situé sur l’autre rive de la Seine.
Vincent Bastien,
chargé de recherches
Commissaire de l’exposition : Gwenola Firmin,
conservateur en charge de la collection de peintures du XVIIIe siècle
Cet article est extrait des Carnets de Versailles n°7 (avril – septembre 2015).
À VOIR
De Versailles à La Motte Tilly. L’Abbé Terray, ministre de Louis XV
Juin – octobre 2015
Château de La Motte-Tilly, 10400 La Motte-Tilly
Horaires : jusqu’au 15 septembre, tous les jours sauf le lundi de 10 h à 12 h et de 14 h à 18 h (dernier accès 30 min avant la fermeture).
À partir du 16 septembre, fermeture à 17 h.
Tarif : 7,50 € / Tarif réduit : 3 €
Accès : en voiture, de Paris ou Troyes : N 19 jusqu’à Nogent-sur-Seine, D 951 ou A 5, sortie Marolles-sur-Seine, puis D 411 vers Nogent-sur-Seine.
Contact : site internet ; tél. 03 25 39 99 67
Exposition en partenariat avec le Centre des monuments nationaux